20 Septembre 2023
Pensez-vous que la position des caisses chez Décathlon soit le fruit du hasard ? Pensez-vous que le chemin balisé vous faisant passer par des endroits précis dans les magasins de l’enseigne suédoise Ikéa soit du fait du hasard ? Croyez-vous que le linéaire « accessoires » (chaussettes, ceintures, etc.) en sortie de cabine d’essayage, dans les magasins de plusieurs enseignes de confection homme (Jules, Célio) soit un hasard ?
Assurément il n’en est rien ! Attardons-nous sur les raisons de ces configurations « magasin » particulières et sur leurs origines, mais aussi sur leurs objectifs.
À une époque, le commerce était relativement simple et facile car la demande restait importante et l’offre inférieure à celle-ci. Il y avait largement de la place sur une ville ou une zone de chalandise pour deux ou trois commerces du même secteur d’activité sans qu’ils ne se fassent ombrage, et chacun gagnait sa vie confortablement.
Les années sont passées, les ouvertures de magasins ont augmenté. Les rassemblements de magasins ensuite en coopérative ont surgi, puis sont arrivées les chaînes, franchises et autres points de vente affiliés. À compter de ce moment-là, le commerce est devenu difficile et en plus nous sortions d’une période économique faste qui disparaissait progressivement, mais tout de même rapidement. Les clients dépensaient moins, et les points de vente se trouvaient plus nombreux.
Il fallait donc impérativement trouver le moyen de vendre plus à nos chalands et consommateurs, et aussi de vendre plus que nos concurrents directs. Pour cela, les premiers ont commencé à mettre en place de la « réclame », puis des promotions. Rapidement copiés par les concurrents, il leur a fallu trouver d’autres astuces pour provoquer l’achat en point de vente.
À ce moment est apparu l’étude du comportement du consommateur, et par la même occasion, une de ses activités : l’étude du sens de circulation en point de vente.
L’objectif de l’étude du comportement du consommateur paraît somme toute assez logique d’étudier le comportement des personnes qui viennent dans le point de vente. Mais à quelles fins ?
Tout simplement comprendre le parcours physique d’une personne dans un magasin, et voir les endroits où il ralentit, stationne, s’arrête longuement pour contempler le produit, voir même vouloir l’essayer.
Tout cela pour une raison très simple, modifier la présentation et le positionnement de ses produits dans le magasin ou les rayons pour inciter le client à acheter plus, grâce à une présentation linéaire proche du chemin standard observé sur les consommateurs.
Le premier moyen pour étudier le sens de circulation en magasin, très simple et pratique à votre disposition reste l’observation. Il faut, si vous décidez de mettre en place ce mode de « surveillance » s’y appliquer d’une manière stricte et structurée.
En effet, il ne suffit pas d’observer le comportement et le sens de circulation des consommateurs dans le magasin du mardi de 10 h à 11 h puis du samedi de 13 h à 14 h. Cela ne servirait absolument à rien, car les données seraient trop faibles et pas assez pertinentes.
Nécessaire et indispensable pour obtenir des résultats proches de la réalité, les observations doivent se dérouler sur toutes les plages horaires d’ouvertures du magasin, chaque jour de la semaine et sur des périodes différentes. En effet, d’une manière évidente, les personnes venant en point de vente le mardi à 10 h 30 n’ont pas le même profil que celles qui viennent le jeudi à 18 h après le travail ou celles qui viennent vous rendre visite le samedi après-midi (souvent en famille).
Il faut également procéder à une liste de critères à valider à l’occasion de ces observations sur le sens de circulation, mais aussi lors de l’analyse des résultats. Il s’agit de choses basiques au premier abord, mais indispensables par rapport à votre gamme produit et par rapport à votre cible de clientèle.
À titre d’exemple, il semble toujours intéressant qu’une journée nous ayons eu 6 fois plus de clients que d’habitude, sans aucune communication, juste car il pleuvait et que les gens venaient se mettre à l’abri.
Voici une liste de critères :
Viennent ensuite les critères de comportement :
Etc.
Ces critères, pas du tout exhaustifs, dépendent de votre objectif par rapport à votre clientèle cible : souhaitez-vous toucher plus d’hommes, acquérir une clientèle plus jeune, etc.
Un autre outil se trouve à votre disposition pour étudier le sens de circulation dans le magasin, si le point de vente est équipé. Il s’agit des enregistrements des caméras. Dans le respect de la législation, vous avez tout à fait la possibilité de visionner les enregistrements de la veille pour faire le point à tête reposée de tous les critères que vous avez listés, et de regarder facilement la circulation. Cela permet également d’avoir une vision du comportement de plusieurs badauds en même temps grâce aux « arrêts sur image ».
Une fois ces observations faites, vous devez renforcer ces constats à l’aide d’autres options.
Vous pouvez faire appel à des clients « test » que vous connaissez pour leurs habitudes de fréquenter votre point de vente, et de les impliquer dans la démarche. Attention, il faut cadrer la démarche de la personne avec des objectifs très précis en l’ informant lors d’une petite réunion de préparation, et aussi, et surtout la motiver par une récompense. Par exemple un bon d’achat de x euros ou une remise de X % sur tous ses achats jusqu’à une date donnée.
Ce que vous pouvez demander à cette personne :
Vous pouvez enfin procéder à un sondage auprès de vos clients, en leur posant quelques courtes questions. Il faut que le sondage soit rapide sans quoi les gens vont bâcler l’étude. Vous récoltez ces sondages dans une urne, et proposez une tombola pour récompenser trois participants de manière à motiver les personnes et avoir suffisamment de réponses exploitables.
Tous ces éléments, observations, clients, sondages doivent vous donner de nombreuses indications sur le comportement de vos consommateurs et leur sens de circulation.
Vous devez rapprocher celles-ci des éléments chiffrés que vous avez du point de vente.
Passez le chiffre d’affaires de chaque famille en revue, en le mettant en face des résultats de visites des gens par rapport à l’emplacement en magasin. Très logiquement, les familles d’articles aux plus faibles ventes vont être celles qui voient le moins de personnes passer.
À ce moment, il faut faire la liste des produits qui tournent le mieux, c’est-à-dire ceux qui ont les ventes les plus importantes par quantité (les 20/80 : les 20 % des références qui font 80 % des ventes) de les positionner sur le plan avec les indications relevées.
Faire la même démarche avec les produits générant la meilleure marge (les 20/80 : les 20 % des références qui représentent 80 % de votre marge brute) de les positionner sur le plan avec les indications relevées lors de l’observation du sens de circulation.
Enfin, effectuer la même démarche avec les produits complémentaires. (Les produits complémentaires sont des articles qui logiquement s’achètent en plus du produit d’origine. Exemple : les produits complémentaires d’une machine à coudre : les bobines de fils, des aiguilles de remplacement, la petite bouteille d’huile de lubrifiant ainsi qu’une rallonge électrique).
Après avoir effectué ces rapprochements et études, un plan de magasin type doit ressortir naturellement.
Maintenant au travail !
À vous d’avoir une influence sur le comportement du consommateur, en lui proposant dans son parcours emprunté habituellement les produits que vous souhaitez lui vendre, pour des raisons évidentes, stock important, plus forte marge, etc.
Autre possibilité, modifier les différentes étagères et gondoles dans le point de vente pour obliger le consommateur à avoir un nouveau parcours dans son expérience client, et ainsi le mettre par défaut devant les produits que vous souhaitez.
Attention, votre travail est très loin d’être terminé sur l’étude de circulation. En effet, ce que vous souhaitez mettre en place, ne signifie pas forcément la réussite. Il vous faut maintenant vérifier les résultats de ce que vous avez mis en place.
Ces éléments vont tout de suite vous dire si vous vous trouvez sur le bon chemin, mais ne prenez pas de décisions hâtives, ce constat ne doit pas être précipité, il doit être fait après une huitaine de jours, puis renouvelé 8 jours plus tard, sauf si vous constatez une chute vertigineuse de vos ventes.
En fonction de vos résultats, il faudra réajuster les réalisations. Le principe du marketing est toujours le même :
Etc.
Vous comprenez sûrement maintenant pourquoi l’organisation interne des magasins change parfois totalement de configuration.
Tout simplement pour perturber le client dans ses habitudes, ou dans son mode d’achat en modifiant son sens de circulation. Pourquoi ?
Le client habitué va directement dans les rayons qui correspondent aux produits de sa liste de courses, le perturber l’oblige à chercher et passer dans plus de rayons, etc.
Être tenté par des mises en avant (à forte marge)
Le temps passé en magasin sera largement supérieur, ce qui augmentera largement le panier moyen dans les semaines suivantes : le client découvrira des rayons dont il n’avait pas forcément connaissance avant.
Attention, cette démarche d’observation du comportement du consommateur dans son sens de circulation doit se faire plusieurs fois dans l’année, à des périodes et saisons différentes, les produits en magasin n’étant pas les mêmes et les attentes et besoins des consommateurs non plus.
Et n’oubliez pas qu’en marketing ce qui est vrai aujourd’hui ne l’est plus forcément demain…
Aviez-vous une idée de l’importance de maîtriser le sens de circulation du consommateur ?
Merci pour le crédit photo à photos-gratuites.com